La délinquance gagne du terrain. Elle frappe désormais à nos portes. Quand elle se passe ailleurs, nous la considérons avec indifférence. Avec insouciance, nous la balayons d’un revers de main. Loin de nous. Loin de nos yeux. Loin de notre quiétude. Aujourd’hui, et depuis quelques temps déjà, elle s’exporte peu à peu chez nous. Elle erre chez nous. Elle rode autour de nous. Elle ronge notre filet de sécurité. Et instaure l’insécurité ambiante. Elle tourmente notre tranquillité. A petite dose mais il y a de quoi s’alarmer. Il y a de quoi sonner le glas avant que ça s’envenime. Surtout quand on constate qu’ailleurs, la délinquance est devenue une spirale infernale. Nous sommes remplis d’inquiétude. Et à chaque fait divers, son lot d’émotion et d’effroi. Et ensuite, rebelote.
Il est grand temps d’agir. Nous ne pouvons ignorer la délinquance qui gangrène notre village et qui empoisonne nos quartiers. De la cacher sous le tapis tel un épiphénomène. Comme un boomerang, elle nous revient en pleine figure. Elle nous frappe de plein fouet. Aujourd’hui, la délinquance est là. Et d’ailleurs, elle est particulièrement agressive. Elle est gratuite et extrêmement violente. Elle est sauvagement brutale. Elle nous exaspère et nous importune. Elle dépasse les limites de notre vivre ensemble. Elle met en péril notre équilibre social.
Aucun village n’est épargné. Cette nouvelle délinquance est protéiforme et imprévisible manifestement. Elle est, hélas dans la plupart des cas, juvénile. Aujourd’hui, elle touche Acoua, ce paisible village que nous portons les couleurs haut et fort. Ce village dont nous louons les qualités et les atouts. Un fait divers, pas banal quand on y regarde de plus près, nous a particulièrement marqué, pas plus tard que mardi, des jeunes de Tchanga en cagoulés après un décrochage avec les jeunes délinquants d’Acoua, ont dégradé les véhicules se trouvant sur leur passage. Les réactions des internautes nous ont frappés. Des appels à la vengeance des plus douces au plus virulents. Voire pire qui dépassent l’entendement humain parfois. Nous martelons ici, nous ne cautionnons guère ces dérapages insensés. Nous ne tolérons guère ces emporte-pièces déchaînés, imbibés de haine et de méchanceté. Parce que ces réactions criées haut et fort cachent la vraie question : dans ce paysage de désolation et de désarroi, comment devrions-nous mettre nos jeunes désoeuvrés – délinquants – dans la bonne voie, dans le droit chemin ? Car nous devons balayer devant notre porte.
Face à ce fléau, le salut ne pourra pas venir que d’en haut. Les deux bouts de la chaîne devront se mobiliser. Les élus, les forces de l’ordre, la justice et les associations doivent oeuvrer ensemble. La justice et les forces de sécurité d’abord pour enquêter, interpeller et juger ces actes afin d’assurer l’ordre public. La politique pour mettre en place des structures adéquates et nécessaires pour occuper ces jeunes parfois déscolarisés et désorientés. Et sans oublier les associations sportives et culturelles, fer de lance des initiatives porteuses d’espoir et d’espérance, de continuer à mener à bien leurs actions.
Force est de constater que la délinquance d’hier n’est point celle d’aujourd’hui. Elle n’est nullement comparable. Il est passé où le temps de chamailleries et de querelles entre villageois, entre les habitants de Mtsangamouji et d’Acoua. Pèle-mèle : la rhétorique bon enfant : « anaréhou bodjonéyi » entonnée affectueusement et chaleureusement et en toute camaraderie lors des derbys sportifs, l’amitié fraternelle tissée et véhiculée de génération en génération, les soirées de Mringué où les coups de poing s’encaissement dans une ambiance enfiévrée et endiablée de joie et de retrouvaille. Avec point d’orgue : une poignée de main en guise de paix et de confiance. Et surtout d’amitié qui inspire le respect et la bienveillance. Aujourd’hui, nos jeunes s’affrontent, s’invectivent et s’injurient rageusement. Avec violence inouïe. Les conflits se règlent à coup d’armes blanches et de dégradations tous azimuts. Et sans état d’âme. Sans foi ni loi. Quel dommage !
Devant le fait accompli, nous ne pouvons nous dérober. Nous ne pouvons plus ignorer la réalité. La nier serait irresponsable. Nous devrions y faire face. Elle nous plonge chaque jour et à chaque fait divers à un profond sentiment d’insécurité et d’impuissante parfois. Elle nous excède et nous révolte. Elle empoisonne notre vie et bouleverse notre vivre ensemble. Nous avons intérêt à ouvrir grandement les yeux pour éradiquer ce fléau. Elle ne touche pas que Mamoudzou et les villages avoisinants. Elle nous y sommes concernés. Malgré nous.
Elle est révélatrice de notre impuissance et de notre négligence à tous les niveaux. Mais elle est surtout conséquence de manque d’éducation parentale, d’abord, sociétale, culturelle et pédagogique. Nous avons tous failli. Il est de notre intérêt à tous de nous mobiliser, de nous interroger sur les causes de ce fléau et de sensibiliser nos jeunes avant qu’il ne devienne ingérable. Ces méfaits, nous devons les dénoncer et les condamner. Avec vigueur et avec fermeté. Pour éviter le pire qui nous menace et qui nous guette, l’optimisme est de rigueur.
Kaya M. Directeur de publication